LES AGENCES DE NOTATION AURAIENT DU NOUS DEGRADER DEPUIS LONGTEMPS
LES AGENCES DE NOTATION AURAIENT DU NOUS DEGRADER DEPUIS LONGTEMPS
Bien évidemment – et au fond à juste titre – on peut s’insurger contre le pouvoir démesuré pris par ces agences privées qui œuvrent sans contrôle et en toute opacité à déconstruire joyeusement la souveraineté des peuples à la moindre saute d’humeur. Mais les agences de notation, aussi incompétentes soient-elles (c’est le moins que l’on puisse dire), n’ont que le pouvoir qu’ont bien voulu leur abandonner nos dirigeants politiques.
Bien évidemment, en réponse à leurs exigences, et pour paraphraser le général de Gaulle, on peut sauter sur chaise comme un cabri en disant l’Europe ! L’Europe ! Ou encore la rigueur ! La rigueur ! La règle d’or ! La règle d’or !
On peut y mettre tous les plans de rigueur que l’on veut, toutes les règles d’or ou de « gouvernance budgétaire[i] » de l’Europe, en l’état notre dette est insolvable. Et fidèles à leurs habitudes (elles avaient déjà été incapables d’anticiper la crise des subprimes), les agences de notation commencent à peine à esquisser le signe comme quoi elles se trompent depuis longtemps.
On peut aussi, tel Candide buvant jusqu’à l’ivresse les paroles de Pangloss, demeurer béat d’admiration devant le « modèle » allemand. Mais même Candide finit par dégorger les logorrhées dogmatiques de son maître. Qu’on se le dise : l’Allemagne est à un niveau d’endettement équivalent au notre, sa population active – contrairement à la notre – diminue (ce qui va diminuer considérablement ses capacités de remboursement de sa dette) et son modèle économique est basé sur des exportations vers … des pays en faillites qui ne pourront bientôt plus rien lui acheter. A choisir, le « modèle » français, que l’on vilipende et prédit pourtant en perpétuel déclin depuis des décennies pour culpabiliser les Français, est moins au fond de l’abîme que son voisin d’outre-Rhin.
Notre dette représente environ 1700 milliards €. Le service annuel de la dette a atteint 80 milliards €, dont 50 milliards € d’intérêts. Faites le calcul : en supposant que les comptes de l’Etat soient à l’équilibre (ce qui est loin d’être le cas), il nous faut au bas mot 6 décennies pour la rembourser dans son intégralité … 60 ans de cure de rigueur … préparez vos enfants et vos petits-enfants …
Bien évidemment, un tel scénario n’est pas crédible, sauf à réduire notre pouvoir d’achat au même niveau que celui du travailleur chinois. On va d’ailleurs, finir par croire que c’est ce que certains veulent. Entendons un peu notre ex-patron de la BCE : « Nous devons aller vers l’élimination des clauses d’indexation automatique des salaires et un renforcement des accords entreprise par entreprise, de manière à ce que les salaires et les conditions de travail puissent s’adapter aux besoins spécifiques des entreprises.»[ii]. Un grand moment d’expression du dogme néolibéral au service de la ploutocratie. Le député européen Pascal Canfin ne s’y est d’ailleurs pas trompé « On se croirait au Politburo de l’Union soviétique quelques mois avant sa chute. C’est la répétition d’un même discours, du même jargon déconnecté de la réalité. »[iii].
Revenons alors un peu à la réalité. En l’état, donc, notre dette est in-remboursable. Il reste alors deux alternatives :
- La dénoncer totalement ou du moins en grande partie. C’est ce qu’a commencé à faire la Grèce. Sauf que la France n’est pas la Grèce. Un défaut français (ou allemand, ou simplement les deux : le défaut de l’un entrainant probablement celui de l’autre) entrainerait les faillites de toutes les banques françaises et dans la foulée de la plupart des banques internationales. Privées de ressources en crédit, de très nombreuses entreprises suivraient. La crise deviendrait ultra-systémique. Les anarchos-troskistes amateurs du Grand Soir en rêve peut-être encore. Mais qu’on ne s’y trompe pas : les salariés se retrouveraient sans emploi et les retraités sans davantage de ressources. Ce Grand Soir c’est surtout un énorme big-bang et l’anarchie sociale généralisée.
- Reste alors une seule solution, que nous sommes nombreux à réclamer depuis longtemps : monétiser la dette (sur le sujet, lire Faut-il monétiser la dette ?[iv]). L’économiste Jacques Sapir en propose d’ailleurs une mise en œuvre extrêmement simple[v].
Alors, pourquoi tardons-nous tant à mettre en œuvre cette solution, probablement sa seule qui nous ayons encore ?
Il reste bien sûr toute une frange de dirigeants qui, tel Jean-Claude Trichet, demeurent engoncés dans leurs dogmes monétaristes et néolibéraux. Il reste aussi les ploutocrates, alliés objectifs et cyniques des néolibéraux, qui se frottent les mains à l’idée d’appliquer une stratégie du choc[vi] qui leur donnera une main d’œuvre à bas prix et employable à merci.
Il reste surtout la lâcheté et l’aveuglement de nos dirigeants politiques. Car, pour une fois, c’est une décision politique qui exige un véritable courage. Quitte à mettre Angela Merkel au pied du mur, voire devant le fait accompli[vii].
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[i] Et sur le sujet de la gouvernance, on ne peut que reprendre l’analyse de Jürgen Habermas : « Le joli mot de "gouvernance" n'est qu'un euphémisme pour désigner une forme dure de domination politique, qui ne repose que sur le fondement faiblement légitimé des traités internationaux. » (interview à Le Monde, 17/11/2011).
[ii]Jean-Claude Trichet, 8 septembre 2011, discours de départ de la BCE, cité par Antoine Dumini et François Ruffin, Enquête dans le temple de l’euro, Le Monde diplomatique, novembre 2011.
[iii] Pascal Canfin député européen, à l’occasion du discours de départ de la BCE de Jean-Claude Trichet (8 septembre 2011), cité par Antoine Dumini et François Ruffin, Enquête dans le temple de l’euro, Le Monde diplomatique, novembre 2011.
[v] Jacques Sapir, Réquisitionnons les banques centrales, Le Monde, 1er décembre 2011, http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/12/01/requisitionnons-les-banques-centrales_1611913_3232.html
[vi] Lire Naomi Klein, La stratégie du choc.
[vii]Bien plus pragmatiques que nous, les Américains commencent à se lasser de l’enfermement idéologique et dogmatique des dirigeants européens. Lire sur Atlantico.fr, La Réserve fédérale américaine va-t-elle finir par faire le boulot de la BCE à sa place ?