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L'Oeil de Brutus

FRANCOIS HOLLANDE EST-IL LE LOUIS XVI DE LA Ve REPUBLIQUE ?

5 Octobre 2012 , Rédigé par L'oeil de Brutus Publié dans #Idées

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FRANCOIS HOLLANDE EST-IL LE LOUIS XVI DE LA Ve REPUBLIQUE ?

 

 

 

Comme le relève Michel Ruch dans une excellente série d’articles sur Atlantico.fr, l’emprise idéologique à laquelle est soumise l’Europe a bien des allures de fin de règne de l’Union soviétique[i]. On peut d’ailleurs couramment relier les formules de propagande des néolibéraux à celles d’autres régimes totalitaires[ii]. Mais la situation actuelle révèle également bien des similitudes avec celle de l’Ancien Régime finissant.

 

 

Au crépuscule de son règne, l’Etat royal était criblé de dettes et ne parvenait plus à les honorer.

En 2012, la France, dit-on, vit depuis des décennies au-dessus des moyens[iii].

 

La fiscalité d’Ancien Régime était composée d’un enchevêtrement de taxes qui faisait porter la quasi-totalité de l’effort sur la bourgeoisie, tandis que la féodalité maintenait dans la misère les plus mal nés et que les nantis de l’aristocratie se voyaient exempts d’impôts.

La fiscalité française est un fatras de niches, d’annones et d’impôts en tous genres qui mettent fortement à contribution les classes moyennes et les petites entreprises pendant que les plus riches et les multinationales peuvent « optimiser » leurs contributions fiscales, quand ils ne décident pas tout simplement de s’y soustraire en fuyant à l’étranger[iv]. De plus, alors que les Trente glorieuses avaient laissé entrevoir l’espoir de voir la pauvreté éradiquée de France, l’aboutissement logique des Quarante piteuses néolibérales est l’explosion des inégalités et le retour en force de la précarité pour les plus faibles.

 

Sous la monarchie, la promotion sociale était quasiment absente : la naissance décidait du rang social.

Dans la France des années 2010, la méritocratie est mise à mal : pour arriver au sommet des élites, quel qu’en soient les domaines – politique, économique et même culturel –, le réseau, le copinage et la règle de l’argent tiennent lieux de compétences[v].

 

Lors de la seconde moitié du XVIIIe siècle, la généralisation de l’’imprimerie et l’alphabétisation avait permis l’éveil des consciences individuelles et collectives.

Au début de ce XXIe siècle, l’explosion d’internet, des blogs et des réseaux sociaux permettent l’émergence d’une critique hétérodoxe et une remise en cause de la pensée unique dominante en dehors des circuits classiques de médias souvent vendus aux plus offrants.

 

La royauté est tombée parce qu’une aristocratie enfermée dans sa Cour versaillaise s’accrochait à ses privilèges et avait perdu tout contact avec la réalité nue de la vie quotidienne de ses sujets.

Qu’en est-il aujourd’hui de l’oligarchie endogame enfermée dans ses contre-ghettos ?

 

L’Ancien Régime finissant avait vu arrivé un roi que tous s’accordaient à décrire comme un homme affable, bricoleur à ses loisirs et bon père de famille. La cruelle Histoire ne s’est pas accordé de son caractère indécis et l’a écrasé sous son poids.

François Hollande est unanimement reconnu comme sympathique, avenant, disposant toujours d’un bon mot et cherchant en permanence le consensus. Il y a encore quelques mois bien peu lui auraient imaginé un destin présidentiel. La pâleur de son début de règne[vi], son apathie indolente face à Angela Merkel et consorts et son incapacité à tirer les leçons de la crise systémique qui nous environne laissent fort à penser que les Français ont porté au pouvoir un Louis XVI républicain[vii].

 

Comme Platon, je crois, sans pour autant que cela en fasse un modèle absolu, aux cycles de l’histoire politique. Au début était l’anarchie, puis les hommes, las du désordre et de la loi du plus fort qui en est le corollaire, portent au pouvoir une aristocratie (littéralement « le gouvernement des meilleurs ») qui rétablit l’ordre au sein de la société. Mais pour que perdure cette aristocratie, elle doit bénéficier d’une légitimité accordée par l’élection : c’est l’avènement de la république. Une fois la république établie, les citoyens entendent de plus en plus gouverner par eux-mêmes : la démocratie prend son envol. Mais une fois celle-ci en place, les hommes croient la liberté et la paix[viii]acquises pour toujours. Ils se détournent alors de la « Chose publique «  (Res Publica) pour se consacrer à la jouissance de leur vie privée. Une oligarchie, pouvant prendre diverses formes (bien souvent ploutocratique), en profite alors pour s’accaparer le pouvoir, prétextant qu’elle le fait pour le bien commun alors qu’elle n’agit plus que pour la conservation de ses rentes. L’équilibre sociétale tombe peu à peu, l’injustice se fait jour à la face de tous, la colère gronde, le désordre (celui des marchés ?) réapparait. L’anarchie est de retour.

 

L’histoire ne se répète pas. On peut parfois croire qu’elle tend à bégayer. Mais ce qui est fort probable, c’est que les mêmes causes produisent bien souvent les mêmes effets.

 



[i] Roland Hureaux relève également que « Les classes dirigeantes de l’Europe, vivant depuis une génération dans l’horizon de la construction européenne et de l’euro, comme les dirigeants de l’ancienne Union soviétique vivaient dans l’horizon du marxisme-léninisme, n’ont jamais envisagé d’autre futur. Ayant engagé toute leur crédibilité sur la réussite de ce projet, elles se retrouveraient à la fois désorientées et disqualifiées en cas d’échec. » Roland Hureaux, Euro : l'impossible dilemme allemand, Marianne, 21/07/2012.

Le jour où il quittait ses fonctions à la tête de la BCE, Jean-Claude Trichet s’exprimait ainsi : « Nous devons aller vers l’élimination des clauses d’indexation automatique des salaires et un renforcement des accords entreprise par entreprise, de manière à ce que les salaires et les conditions de travail puissent s’adapter aux besoins spécifiques des entreprises.» Le député européen Pascal Canfin relevait alors qu’ : « On se croirait au Politburo de l’Union soviétique quelques mois avant sa chute. C’est la répétition d’un même discours, du même jargon déconnecté de la réalité. » Pascal Canfin député européen, à l’occasion du discours de départ de la BCE de Jean-Claude Trichet (8 septembre 2011), cité par Antoine Dumini et François Ruffin, Enquête dans le temple de l’euro, Le Monde diplomatique, novembre 2011.

[iii] Elle a surtout fait des choix, notamment monétaires, qui la mette à la merci des « marchés », et surtout de ce qui se cache derrière : le monde de la finance et de la rente.

[iv] Sur l’anti-progressivité de l’impôt en France, lire Thomas Piketty, Camille Landais, Emmanuel Saez, Pour une révolution fiscale. Voir également Pour une réforme radicale de la fiscalité.

[v] Lire Sophie Coignard et Romain Gubert, L’Oligarchie des incapables.

[vii] On pourrait aussi ironiser sur leurs rapports respectifs aux femmes.

[viii] Tiens, tiens : comme le mythe de la paix éternelle vendu par les européistes.

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M
I was able to understand why you come up with such a statement. Due to his interventions and policies, it is not a problem to portrait Francois Holland as the Louis XVI of the Republic Ve. I think you have included sufficient proofs to justify it.
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