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L'Oeil de Brutus

MARIAGE GAY ET PENALISATION DE LA PROSTITUTION : QUAND LA CLASSE POLITIQUE TOUCHE LE FOND (mise à jour 17/09/12).

27 Août 2012 , Rédigé par L'oeil de Brutus Publié dans #Idées

 

ps-copie-1« L’Europe institue à présent des « sujets francs » (économie, social) à propos desquels le débat entre partis politiques s’évanouit, puisqu’il s’agit de domaines de souveraineté limitée ou nulle. La discussion se concentre alors sur des thèmes de société : burqa, légalisation du cannabis, radars sur les autoroutes, polémique du jour à propos de la phrase malencontreuse, du geste impatient, du juron d’un homme politique étourdi ou d’un artiste qui a trop bu. Ce tableau d’ensemble confirme une tendance déjà perceptible depuis deux décennies : la délocalisation du pouvoir politique vers des lieux d’apesanteur démocratique, jusqu’au jour où l’indignation éclate. Nous y sommes. » Paul Krugman, cité par Serge Halimi, Ne rougissez pas de vouloir la lune : il nous la faut, Le Monde diplomatique, juillet 2011.

  

 

   

 

 

MARIAGE GAY ET PENALISATION DE LA PROSTITUTION : QUAND LA CLASSE POLITIQUE TOUCHE LE FOND.

 

 

Ce sont peut-être les deux sujets majeurs de la rentrée politique. Au risque de choquer, je m’en contrefous.

Dans un pays qui compte plus de 4 millions de chômeurs, une dette pharaonique, dans lequel les forces de police se font tirer dessus dans des zones de non-droit, où l’éducation nationale ne semble plus à même de tenir son rôle tant dans son cadre social que dans celui de l’insertion professionnelle, et alors que l’on est sur le point de nous faire passer en catimini un traité qui confiera notre budgets à des technocrates non-élus, il y a des sujets autrement plus importants que des questions sociétales qui ne touchent qu’une infime minorité dont on cherche par clientélisme électoral à s’assurer le vote. Et qu’on ne vienne pas me dire qu’un simple acte administratif – le mariage –, aussi symbolique soit-il, est dans la droite ligne de la légalisation de l’IVG et de la dépénalisation de l’homosexualité. Il s’agit ici de donner une autorisation administrative à des maires, non de mettre fin à des emprisonnements arbitraires du fait de ses affinités sexuelles ou du choix d’une femme de mettre un terme à une grossesse non désirée. Quant à la pénalisation de la prostitution, le parti socialiste préfère sans doute culpabiliser les clients de péripatéticiennes (au risque qu’un certain nombre d’entre eux aillent assouvir leurs bas instincts d’une autre manière …) que de s’occuper de la réhabilitation d’une classe politique discréditée par son éloignement des préoccupations de la population, son affairisme, son clientélisme et sa corruption[1] au moins morale sinon matérielle[2].

En fait, cette centralisation du débat politique sur des questions sociétales de second ordre n’est qu’une stratégie consistant à établir un rideau de fumée pour masquer les convergences fortes sur le fond entre le PS et l’UMP qui tous deux adhèrent à un européisme béat et à son corollaire, l’idéologie néolibérale de la rigueur budgétaire et de la dictature technocratique. Dans quelques jours, les députés des deux « camps » voteront comme un seul homme, ou presque, pour ratifier en catimini le TSCG[3]qui permettra à des technocrates bruxellois non élus de décider du budget de la nation.

De la même manière, or l’achèvement du détricotage symbolique de la loi TEPA[4], déjà bien entamé à la fin du mandat de Nicolas  Sarkozy, le gouvernement dit « de gauche » ne semble pas à même de conduire une vraie réforme fiscale d’ampleur qui puisse enfin aboutir à une fiscalité juste et efficace.

Au niveau européen, il n’a suffit que de quelques semaines pour que M. Hollande s’aplatisse devant l’hôtel de la rigueur budgétaire de Mme Merkel en osant de plus faire croire aux Français qu’il avait en contrepartie obtenu un plan de croissance qui n’est que poudre aux yeux[5]. Inutile d’évoquer la régulation du monde de la finance : rien n’a été entrepris.

L’éducation ? aux abonnés absents : le gouvernement préfère des pseudo concertations avec des syndicats vendus au pédagogisme et idéologiquement obtus. Et que dire du soi-disant plan de sauvetage de l’industrie automobile qui ne solutionne rien à la concurrence de la main d’œuvre à bas prix, faible protection sociale et faible considération environnementale que pratiquent les concurrents asiatiques, mais aussi l’Allemagne qui délocalise une grande partie de sa production dans des pays Europe de l’est qui, bien que membre de la « famille européenne », pratiquent allégrement les dumping fiscal, social et environnemental ?

Rigueur budgétaire, fiscalité globalement anti-redistributive, indépendance de la banque centrale, libéralisation du commerce extérieur, privatisations des services publics, maintien de la déréglementation des marchés : dans tous ces domaines issus de la doxa néolibérale du consensus de Washington, PS et UMP sont peu ou prou sur la même longueur d’onde. Pour justifier une alternance qui n’en est pas une, il leur reste donc à se concentrer sur des sujets secondaires, si possible clivant et à même de diviser les Français alors même que la période difficile que nous vivons exige de savoir, sinon tenter, de les rassembler autour de courageuses réformes systémiques de fond.

 

 

 



[2] On rétorquera que le Président de la République a mis en place la commission Jospin sur la moralisation de la vie publique. Est-il besoin d’une commission pour s’apercevoir que le cumul des mandats, qui crée une caste endogame fermée, et les conflits d’intérêts des élus sont une plaie pour la démocratie ? Il suffirait dont simplement d’en interdire l’exercice : plus de cumul des mandats et interdiction pour les élus de percevoir des revenus  autres que ceux de sa charge et éventuellement de son patrimoine (quitte à rehausser le niveau de leurs rétributions) avec création d’un comité de déontologie pouvant interdire à l’issue d’un mandat électoral l’exercice d’une profession manifestement en conflit d’intérêt avec la charge précédente de l’élu.

Cette manie de créer de commission, héritée de l’ère Sarkozy, n’est en fait qu’une stratégie de communication visant à divertir l’opinion tout en s’abstenant de prendre des décisions.

Pour mémoire : François Hollande et le gouvernement ont créé une Commission chargée de la rénovation et de la déontologie de la vie publique, une Commission chargée d’élaborer le nouveau livre blanc sur la défense, une Mission d’évaluation sur la France dans l’Otan, une Mission sur la création à l’ère du numérique, une Mission sur la fin de vie, une Concertation sur l’éducation, une Concertation sur l’indexation du SMIC, une Mission sur le financement de la protection sociale, un groupe d’experts pour réformer le système de retraites, une Commission sur un plan pour l’avenir de la branche automobile, une Mission sur la compétitivité des entreprises, une Mission sur l’avenir de l’Audiovisuel extérieur de la France, une Concertation pour une Conférence environnementale. Et la liste n’est pas exhaustive !

[3] Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance.

[4] Votée dès le début du mandat de M. Sarkozy, la loi TEPA (travail emploi pouvoir d’achat) mettait en place, notamment, le bouclier fiscal,  la défiscalisation des heures supplémentaires et le relèvement du seuil des impôts sur les héritages.

[5] Plus de la moitié du plan soi-disant de croissance européen est constitué de fonds dont les engagements étaient déjà programmés. Il ne représente que 0,3% du PIB de la zone euro pendant trois ans soit certainement pas de quoi obtenir une relance de l’économie.

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O
This is all the story of the real Europe and the news that burns over there. All these news emerged as a result of the political party issues that are on the go in the sate along with the burqa, the legalization of cannabis and radars on highways
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A
la classe politique vit dans une autre ère, elle devra être en phase avec la philosophie actuelle
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