VOTE "UTILE" ET "PETITS" CANDIDATS
VOTE UTILE & PETITS CANDIDATS
Mots clés : élections présidentielles, 2012, France, Nicolas Dupont-Aignan, Nathalie Arthaud, Philippe Poutou, Jean-Luc Mélenchon, François Hollande, François Bayrou, Jacques Cheminade, Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen, Eva Joly, UMP, PS, Front de Gauche, Debout la République, DLR.
Le vote utile n’existe pas. Car affirmer qu’il existe un vote utile, c’est sous-entendre, qu’en miroir, il en est d’inutiles. Or le principe même de la démocratie est que chacun peut exprimer ses idées dans le respect de l’autre. Claironner au vote utile – et donc vilipender le vote inutile – c’est mépriser, bafouer, écraser, refuser le débat aux idées discordantes de la pensée unique. Le vote « utile » est un déni de démocratie. Et, au fond, cela correspond bien au comportement de la dyarchie PS-UMP qui, à la botte des ploutocrates et de leurs clientèles respectives, méprisent le peuple et la démocratie depuis plus de trois décennies[1]. Voilà pour l’aspect de principe.
Mais il est aussi un aspect pratique. Les médias et la pensée dominante de la dyarchie nous servent à longueur de temps du « à quoi sert de voter pour untel puisqu’il ne sera jamais élu »[2]. Ce type de comportement est là aussi un déni de démocratie. Par la même, ces terroristes du débat cherchent à jouer les Pygmalion et leur arrière pensée est claire : interdire l’accès au débat à tout ce qui sort de la pensée unique néolibérale et qui pourrait nuire potentiellement à la ploutocratie qui les nourrit, et qui les nourrit bien comme l’atteste leur refus de faire part de leur revenus. Mais la perversion ne s’arrête pas là.
Même si un candidat n’accède pas au second tour, son score au 1er tour est fondamental pour la suite du débat. Car on ne vote pas uniquement pour un personnage, mais aussi – et surtout – pour faire valoir les idées qu’il représente. Les idées d’un Nicolas Dupont-Aignan ou d’un Jacques Cheminade à 10% au 1er tour ne pèseront absolument pas de la même manière sur les débats du 2nd tour que s’ils plafonnent à 1%.
C’est d’ailleurs bien pour cela qu’ils sont ostracisés par la pensée unique néolibérale et européiste en diable des médias véhiculés par les Yves Calvi, Jean-Michel Apathie, Christophe Barbier et autres Jean-Marc Sylvestre[3]. Sans même parler des sempiternels donneurs de leçons à la Alain Minc, Jacques Attali ou Jean-Hervé Lorenzi qui pataugent allègrement dans les conflits d’intérêts[4]. Tous ceux-là participent aussi très bien de « l’oligarchie des incapables ». Incapables de se remettre en cause. Incapables d’analyser autrement que doctement les programmes des candidats. Incapables de sortir de leur asservissement à une ploutocratie qui les nourrit si bien. Les médias de la pensée unique sont bel et bien une nouvelle inquisition : celle qui se lie à la religion de l’individu-dieu et de l’argent-roi. La torture physique a simplement été remplacée par la mise à mort médiatique[5]. Les mises en accusation de protectionnisme sont lancées comme autrefois celles en sorcellerie. Tout adversaire supposé de l’Europe néolibérale est suspecté de commerce avec le Malin. Même le patriotisme est immédiatement soupçonné de connivences avec l’extrême-droite.
Et pourtant les résultats des « petits » sont bel et bien à même de faire bouger les lignes. Ainsi, avec son score flatteur aux primaires socialistes, Arnaud Montebourg aurait pu faire infléchir la ligne libérale d’un PS engoncé dans les mêmes dogmes que son binôme de dyarchie. Mais le député bourguignon a préféré se coucher sans concession devant le plus puissant du moment pour mieux préserver ses ambitions personnelles pour 2017 ou 2022. Sa démondialisation n’était ainsi probablement qu’un simple opportunisme politicien et démagogique sans conviction profonde pour s’offrir un avenir. Il suffit de constater son absence et son silence pendant la campagne présidentielle pour comprendre que le louveteau attend sagement dans l’ombre du loup que celui-ci tombe ou qu’il le laisse, plus ou moins amicalement, lui succéder.
La poussée de Jean-Luc Mélenchon en est un autre exemple. Il y a 3 mois, la dyarchie, au mieux, le regardait avec amusement ; au pire avec mépris. Mais dès que les sondages ont annoncé une percée, elle a du reprendre au plus vite ses thèmes de campagne. La tranche marginale d’imposition à 75% ou l’imposition des exilés fiscaux, ou encore la réforme de la BCE viennent de là. Et rien que de là. La question étant maintenant de savoir si le candidat du Front de Gauche ira s’asseoir sur ses idées pour poser son séant sur quelques strapontins ministériels de seconde zone. Il semblerait cependant qu’il ait pris des engagements clairs pour que ce ne soit pas le cas.
Il n’y a donc pas de « petits » candidats.
Il n’y a pas de vote inutile.
Et donc pas de vote utile.
Il n’y a que les idées que nous estimons les meilleures pour notre Nation ou, pour les « internationalistes imbéciles »[6] que ce mot débecte, les habitants de notre pays et de notre planète.
Les électeurs ne doivent pas tomber dans les bas calculs des politiciens en « votant contre » ou en « votant utile », deux concepts qui ne veulent rien dire et qui détruisent la démocratie.
Ce dimanche, votez pour vos idées, quelles qu’elles soient. Si vous croyez encore à l’internationalisme marxiste-léniniste (malgré tous les ravages qu’il a pu causer), votez Mme Arthaud ou M. Poutou. Si vous croyez en la République Sociale inspirée de l’esprit de la Commune de Paris, votez M. Mélenchon. Si vous êtes partant pour 40 ans de rigueur, votez M. Bayrou. J’oserais même : si vous êtes xénophobe et assez naïf pour croire au revirement social de dernière minute du FN, votez Mme Le Pen. Si vous êtes pour l’immobilisme et que la continuité de l’oligarchie des incapables ne vous effraie pas, votez M. Sarkozy ou M. Hollande. Si vous êtes gaullistes et que les idées originales, voire excentriques, ne vous font pas froid aux yeux, votez M. Cheminade. Si vous êtes gaullistes républicains et croyez encore au rôle et à la grandeur de la France, votez M. Dupont-Aignan. Au pire des cas, si vous êtes désespérés, votez blanc. Mais votez ! C’est cela faire honneur à la démocratie et à votre devoir de citoyen.
[1] Sur le sujet, lire Sophie Coignard et Romain Gubert, L’Oligarchie des incapables, Albin Michel 2012.
[2] Lire Julien Salingue, Jean-Michel Aphatie, la démocratie et les « candidats inutiles », Acrimed.org, 03/02/2012.
[3] Qui n’a même pas honte de s’exclamer « Le juge de paix de l’élection sera évidemment le marché » (I-télé, 04/04/2012). Belle preuve de son respect de la démocratie !
[4] Lire, entre autres :
- Hervé Nathan, « Les imposteurs de l’économie » bouscule les économistes médiatiques, Marianne, 15/04/2012.
- Le Terrorisme intellectuel de Jacques Attali.
- Sophie Coignard et Romain Gubert, L’Oligarchie des incapables, Albin Michel 2012.
- François Hollande, dis-moi qui te conseille, je te dirai qui tu es.
[5] Sur le sujet, lire Henri Hude, Démocratie durable¸ Monceau 2010, en particulier le chapitre Constitutionnaliser le Léviathan médiatique.
[6] Selon le bon mot de Jacques Sapir : « La haine de la nation est l’internationalisme des imbéciles ».