DU JACOBINISME
DU JACOBINISME
Le jacobinisme[1] est souvent vu comme un pur produit de la Révolution. Certes, cette dernière lui a donné un nom mais la politique centralisatrice française trouve ces racines bien en avant : depuis leur arrive à la tête d'un petit duché qui ne constituait même pas l'Ile-de-France, les capétiens n'ont eu de cesse que d'unifier sous une même Loi et selon les mêmes préceptes régaliens l'ensemble de la France. En ce sens, Philippe le Bel - par exemple - a été bien plus "jacobin" que nombre de nos Président de la République. Le général de Gaulle considérait avec justesse que la Révolution n’était pas une rupture totale dans l’Histoire de France. Il n'y a pas une France de l'Ancien de Régime et une France de la République (de la même manière qu'aujourd'hui il n'existe pas une France des Français dits de souche et une France des immigrés). L’unicité de la France est le fruit d'une longue maturation de l'Histoire.
On a trop souvent eu tendance à opposer le jacobinisme à la décentralisation, menée en France de manière totalement inepte[2] et, comme dans beaucoup de chose, sans aucune vision[3] et en s'appuyant uniquement soit sur des dogmes soit sur la démagogie, soit sur le clientélisme.
Tocqueville[4] préconisait à la fois la centralisation et la décentralisation :
- une centralisation gouvernementale : la représentation politique du peuple dans son ensemble fixe les grandes lignes de son "vivre ensemble" (lois fondamentales, défense, fiscalité, éducation, diplomatie ... etc.) et forge ainsi l'unicité de la République.
- une décentralisation administrative, selon le principe de subsidiarité : toutes les décisions de vie courante doivent être prises aux plus près des citoyens (conseils de quartiers, conseils municipaux ...).
Cette vision pragmatique permet ainsi de contourner l’opposition entre jacobinisme, d’une certaine manière ancré dans les gènes de la politique française, et la décentralisation, que le sens pratique rend nécessaire. Un point doit toutefois être relativisé par rapport à l’analyse de Tocqueville : la taille des Etats-Unis est sans commune mesure avec celle de la France ; celle-ci ne saurait donc justifier la multiplication des échelons territoriaux. Dans l’organisation actuelle, les communes (en parallèle des communautés de communes) et les départements sont des non-sens, et c’est pour cela qu’ils sont légitimement et dédaigneusement ignorés par les citoyens.
Dans le même registre, ne nous leurrons pas : la démocratie participative est une lubie post-rousseauiste qui ne sert actuellement qu'en tant que concept creux à des fins de communications démagogiques : elle est totalement inapplicable à l'échelle d'une Nation telle que la France et ne peut être usitée qu'aux échelons de quartiers ou de petites communes. Ceux qui la réclament à l’échelon national ne doivent d’ailleurs pas souvent avoir ouvert les ouvrages du grand Jean-Jacques.
[1] : Le jacobinisme est une doctrine politique qui défend la souveraineté populaire et l'indivisibilité de la République française. Il tient son nom du club des Jacobins dont les membres, issus du mouvement du jansénisme parlementaire, s'étaient établis pendant la Révolution française dans l'ancien couvent des Jacobins à Paris. Il tend à organiser le pouvoir de façon très administrative (bureaucratie) et très centralisée (centralisation) et à le faire exercer par une petite élite de techniciens (technocratie) qui étendent leur compétence à tous les échelons géographiques et à tous les domaines de la vie sociale afin de les rendre uniformes, ce qui en fait l'adversaire du régionalisme. Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacobinisme
[2] : Par exemple sur le chapitre de la fiscalité. Lire : http://loeildebrutus.over-blog.com/article-pour-une-reforme-radicale-de-la-fiscalite-65357242.html
A l’heure où les comptes de la Nation sont dans « le rouge », le coût des collectivités territoriales est une aberration. Sur le sujet, lire le numéro de Challenges d’avril 2009 (« ces élus qui nous coutent cher »). A titre d’exemple, les budgets de fonctionnement (et uniquement de fonctionnement) cumulés de nos départements dépassent les 40 milliards d’’euros ! Soit les 2/3 du budget de l’éducation nationale et plus que le budget de la défense, c’est-à-dire que la Nation consacre un effort du même registre à l’entretien d’une collectivité territoriale qu’à l’éducation de ses enfants ou la défense de ses intérêts dans le monde !
[3] : « Il (le politique) s’est démultiplié par la décentralisation, mais au prix d’une complexité accrue qui n’a fait que donner de nouveaux prétextes à l’immobilisme administratif et rendre illisible la cartographie du pouvoir. »
Dominique de Villepin, Le cri de la gargouille.
[4] : Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique.