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L'Oeil de Brutus

Manuel Valls, le premier ministre qui insulte la France

3 Août 2014 , Rédigé par L'oeil de Brutus

Manuel Valls, le premier ministre qui insulte la France

Manuel Valls, le premier ministre qui insulte la France

Article également publié sur Gaulliste libre

Dans l’hystérie médiatique qui a entouré le crash du vol MH17 en Ukraine puis celui d’Air Alger au Mali, le discours de Manuel Valls à l’occasion de la commémoration de la rafle du Vel d’Hiv a été peu relevé. Pourtant, il hautement significatif de sa conception de l’histoire et de la France, et au-delà, des conceptions et de l’idéologie qui sont les marquants du PS[i].

Le premier ministre s’est exprimé ainsi :

"Oui, la France était à Vichy. Et elle était à Paris. Là, des gens, des personnages hargneux, animés des pires préjugés théorisaient la supériorité de certains hommes sur d'autres hommes, et appelaient à la 'haine du juif'. Ils croyaient en une patrie pure, purifiée, fantasmée, en la prétendue nécessité de la régénérer et de chasser les ennemis qui se cachaient en son sein.[ii]"

Cette formulation des responsabilités de la France dans la Shoah va bien au-delà de tout ce qui a pu être déclaré par autorités politiques française. Il prolonge certes le discours, déjà en amplement ambivalent pour la France, de Jacques Chirac du 16 juillet 1995. Mais celui-ci imputait la responsabilité de la rafle du Vel d’Hiv à l’Etat français de Vichy, non à la France, et rappelait aussitôt que la « France n'a jamais été à Vichy. Elle n'est plus, et depuis longtemps, à Paris. Elle est dans les sables libyens et partout où se battent des Français libres. Elle est à Londres, incarnée par le Général de Gaulle. Elle est présente, une et indivisible, dans le cœur de ces Français ».

Or, pour Manuel Valls, « la France était à Vichy », même s’il précise aussitôt après dans son discours qu’elle était aussi à Londres. A son sens, donc, la France est divisible. Cela en dit long sur sa conception de l’Histoire et de la France.

Sa conception de l’Histoire tout d’abord. Le Régime de Vichy qui a planifié, coordonnée et exécuté la rafle du Vel D’Hiv, n’a ni légalité ni légitimité. La Loi constitutionnelle du 10 juillet 1940 qui a donné les pleins pouvoirs à Philippe Pétain est votée par une Assemblée rassemblée sous la contrainte, dont une partie des membres a été exclue par la force et qui n’avait pas mandat du peuple français pour réaliser une telle délégation de pouvoir. La mise en place du régime de Vichy est un coup d’état. Il est donc illégal et ne retrouvera jamais les voies de la légalité en consultant le peuple français pour lui faire avaliser sa constitution. Mais il est aussi illégitime. Si, abasourdie par la terrible défaite de mai-juin 1940, une majorité de Français se range dans un premier temps derrière le vainqueur de Verdun, l’entrevue de Montoire (23 octobre 1940, Pétain rencontre Hitler et annonce sa volonté de collaborer avec le régime nazi) et les premières lois antisémites (vote du statut des juifs dès le 3 octobre 1940) ont tôt fait de montrer aux Français la nature ignominieuse du régime. Aussi, dès le second semestre 1940, les premiers réseaux de résistance s’organisent : les communistes, pourtant stipendiés pour les accords germano-soviétiques, créent le premier réseau de résistance universitaire en septembre 1940 sous la houlette de Jacques Decour, Georges Politzer et Jacques Solomon ; Libération-Nord, proche de la SFIO, est sur pied dès décembre 1940 ; le réseau « Alliance »[iii], qui comporte pourtant des membres de l’extrême-droite d’avant-guerre, existe en novembre 1940 ; Henry Frenay a mis en place le Mouvement de libération nationale (MLN)[iv] dès août 1940 ; au même moment Boris Vildé met en place le réseau du Musée de l’Homme ; Emmanuel D’Astier de la Virgerie initie « La Dernière colonne », qui deviendra Libération-sud, en octobre 1940. Bien d’autres suivront. Et surtout, dès le 18 juin 1940, la France libre est à Londres sous l’autorité du général de Gaulle, secrétaire d’Etat du dernier gouvernement légal et légitime de la IIIe République. Celui-ci ne s’y trompe d’ailleurs pas lorsque, malgré les demandes de plusieurs chefs de la Résistance et dans la liesse populaire de la Libération de Paris, il refuse de proclamer la République. Car la République n’a pas cessé d’exister. Vichy n’était qu’une verrue illégale et illégitime. Prétendre autre chose, c’est insulter au cœur tous les Résistants, toute la France.

Or, par ses paroles, Manuel Valls donne légalité et légitimité à Vichy. Comme si l’histoire des institutions ne pouvait être vue que sous l’angle de la territorialité. Comme si les Français avaient massivement adhéré au régime de Pétain et de Laval. Les Français qui se sont noyés dans les affres de la Collaboration n’ont été qu’une infime minorité, dont une bonne partie d’ailleurs, très probablement, sous la contrainte. Les Résistants, certes guère plus nombreux au début de l’Occupation mais infiniment plus rassembleurs 4 ans plus tard, n’ont pas fait leur choix sous la contrainte, mais bien au contraire, ils ont fait le choix du courage, souvent hors limite. Rien que pour cela, leur densité représentative est bien plus importante. Donc, non M. Valls, la France n’était pas à Vichy.

Cela en dit également long sur la conception de la France et de la nation de notre premier ministre. Car, effectivement, dans son discours, il rappelle malgré tout que la France était aussi à Londres. Pour M. Valls, donc, la France est divisible, morcelable à merci. Où est donc l’indivisibilité la nation ? Le rassemblement des Français derrière leurs valeurs ? Ce discours, en fait, masque deux objectifs, l’un à long terme, l’autre à court terme.

Le premier est, dans la folie de l’utopie idéologique européiste, de détruire la Nation, ce concept supposé renfermer toutes les haines rances du nationalisme. Simplisme de la pensée, mais c’est le propre de tous les idéologues, incapable de dissocier l’idée de l’idéologie. Sur ce point, reprenons simplement Jacques Sapir : « Qu’il puisse y avoir des usages que l’on considère « de droite » ou « de gauche » des concepts de souveraineté et de Nation est indubitable et indiscutable. C’est le propre de tout instrument de pouvoir être mal utilisé. Mais, cessons nous d’utiliser un couteau parce qu’il fut utilisé par certains pour commettre des crimes ? Cessons nous de prendre le train, parce que le système ferroviaire fut central dans la réalisation de certains génocides, de celui qui frappa les Arméniens en 1915 à celui qui fut commis par les Nazis contre les juifs et ceux qu’ils appelaient des « sous-hommes » ? Bref, on n’a jamais vu dans l’histoire de la pensée un instrument condamné du fait du mauvais usage qu’en firent certains. Le discours qui prétend refuser la Nation et la souveraineté du fait des mauvais usages qui ont pu être ne tient pas. C’est un discours moralisateur d’une rare bêtise qui confond les niveaux d’abstraction »[v].

Car dans la construction idéologique libérale-libertaire de l’Europe version Union européenne, la nation n’a pas sa place. C’est bien ce que rappelle le secrétaire nationale d’Europe-écologie-les Verts, Emmanuel Coste, lorsqu’elle affirme que « l’Europe sera d’autant plus intéressante qu’on arrivera à une dissolution de l’Etat Nation »[vi]. Soit l’exact opposé de la vision gaullienne : "Je ne vois pas que l'Europe puisse avoir aucune réalité vivante si elle ne comporte pas la France avec ses Français, l'Allemagne avec ses Allemands, l'Italie avec ses Italiens, etc. Dante, Goethe, Chateaubriand, appartiennent à toute l'Europe dans la mesure même où ils étaient respectivement et éminemment Italien, Allemand et Français. Ils n'auraient pas beaucoup servi s'ils avaient été des apatrides et s'ils avaient pensé, écrit en espéranto ou volapük intégrés"[vii]. Le vrai clivage politique de notre temps est donc bien là : les différentes manières dont nous voulons construire l’Europe et la conception que nous avons de la Nation et de la démocratie, ces deux dernières étant intrinsèquement liées (il n’y a pas d’exemple dans l’histoire de démocratie qui se soit développée hors du cadre national). Le problème est que PS et UMP, à un iota près, nous servent la même soupe libérale-libertaire pendant que le FN surfe sur les mécontentements, servant là d’idiot utile aux deux autres qui peuvent appeler au « vote républicain » (eux qui ne sont plus républicains que dans les mots) pour se maintenir à leurs prébendes et petits plaçous pendant que le parti de la famille Le Pen change de logiciel de pensée politique (par exemple sur l’économie, mais pas seulement) au gré de vents tout en s’attachant à conserver sa base xénophobe et héritière de toutes les mouvances de l’extrême-droite française.

Et, justement, c’est ce qui permet au discours de Manuel Valls de toucher son deuxième objectif, de court terme. A savoir diviser les Français en jetant du sel sur les vieilles blessures. Car l’oligarchie en place n’a plus que cela pour se maintenir: Divide e impera. Serions-nous unis, Français de cœur et de valeur, nous aurions tôt fait de les bouter hors. Chaque jour qui passe, chaque discours ignominieux que l’oligarchie tient dans sa fuite en avant pour se maintenir au pouvoir, ou plutôt à son ersatz de pouvoir - car cela fait bien longtemps qu’elle a tout abandonnés aux marchés et à la technocratie bruxelloise – nous rapproche davantage de cette union. Lorsque, à coups de mensonges, il a accepté de signer le traité « règle d’or » (TSCG) sans en bouger une virgule, M. Hollande avait déjà commencé sa longue descente en illégitimité. Il a confié les rênes d’un gouvernement fantoche, à la solde de la finance globalisée et de Bruxelles, à M. Valls. Ce gouvernement conserve encore pour lui les apparats de la légalité. Mais au rythme où vous allez, c’est à votre sujet M. Valls, que l’on pourra bientôt dire que vous n’êtes plus le gouvernement de la France.

[i] Merci à Pablito Waal de l’avoir signalé sur son blog.

[ii] Voir ici : http://www.francetvinfo.fr/france/video-oui-la-france-etait-a-vichy-dit-valls-a-la-commemoration-de-la-rafle-du-vel-d-hiv_651851.html

[iii] Initialement sous le nom « Croisade ».

[iv] Qui deviendra le fameux réseau « Combat ».

[v] Jacques Sapir, Droite, gauche, souveraineté, Russeurope, 04/072014.

[vi] Emission "Mots croisés", France 2, 09/12/2013.

[vii] Charles de Gaulle, Conférence de presse, 15/05/1962.

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R
L'auteur s'egare quelque peu dans son raisonnement... Vichy a bien ete une partie de la france ... helas...
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L
Que des Français aient fait Vichy est indéniable, cela ne veut pas dire que la France, c'était Vichy. <br /> en outre, la France, tant en tant que Nation qu'en tant que concept, est indivisible, sinon la France n'a plus de sens. Une partie, non négligeable, d'industriels et de financiers américaines (à commencer par M. Kennedy père) ont collaboré, voire soutenus, le régime nazi. Peut-on pour autant dire qu'une &quot;partie des Etats-Unis&quot; était allié des Nazis ? <br /> A l'inverse, pourquoi ne pourrait-on pas dire qu'une partie de la France était le FLN pendant la guerre d'Algérie, puisque le FLN a eu un nombre non négligeable d'alliées parmi les Français métropolitains ? Toujours avec le même raisonnement, en 1792, la France est où : à Paris ou à Coblenz, ou les deux ? <br /> Découper ainsi les Nations, c'est nier leur existence, mais aussi avoir une vision complètement faussée de l'Histoire, puisqu'on ne fait plus de celle-ci qu'une accumulation d'individualités.
L
Un excellent article et qui résume bien le personnage dont on voudrait nous faire croire qu'il est plébiscité par la majorité des Français. Mais, prenez garde à vous, cher Brutus, en hollandie on n'aime pas ceux qui parlent vrai !
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L
Merci à vous. Pour la liberté en Hollandie, je l'avais noté : http://loeildebrutus.over-blog.com/2014/03/de-la-liberte-en-hollandie.html