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L'Oeil de Brutus

NOVLANGUE ET USAGE DU MOT « RACE »

5 Juin 2013 , Rédigé par L'oeil de Brutus

NOVLANGUE ET USAGE DU MOT « RACE »

NOVLANGUE ET USAGE DU MOT « RACE »

« Pour celui qui n’a qu’un marteau, tout prend la forme de clous. » Mark Twain.

Suite aux réactions suscitées par l’article paru il y a quelques jours sur l’usage de la novlangue en Hollandie, je reviens ici sur ce qui n’était qu’un exemple introductif de cet article pour en approfondir quelque peu le sujet : le projet de loi visant à interdire l’usage du mot « race » dans les écrits de la République, y compris lorsqu’il s’agit de rappeler que « la République ne reconnaît pas de race ».

Je ne m’étendrais pas excessivement sur la rhétorique idéologisée qui consiste à qualifier de « raciste » toute personne refusant de retirer le mot « race » de son vocabulaire. Comme nous le verrons plus en avant, cette approche relève soit d’une profonde méconnaissance de la langue française (et d’une absence complète de curiosité à son égard), soit d’un prisme complètement idéologisé qui confirme bien l’emprise et le développement de la novlangue, soit – et c’est le plus probable – les deux à la fois, idéologie et inculture allant généralement de paire. D’une manière très simple, si l’on estime que tout usager du mot « race » est raciste, alors on devra taxer de sexiste toute personne parlant d’homme et de femme (et donc également bannir ces deux mots du vocabulaire, ce qui semble bien être le projet des adeptes de la théorie du genre, autre vecteur idéologisé de production de novlangue). En outre, s’il s’agit également de bannir tous les mots qui désignent des concepts qui n’existent pas (ou sont supposés de ne pas exister), le petit Larousse va connaître une sacrée cure d’amaigrissement ! Les athées demanderont ainsi la disparition du mot « dieu » oubliant que même dans l’hypothèse où factuellement Dieu n’existerait pas, il restera bien un endroit où il existe encore : dans la tête des gens qui y croient. Il en est de même pour le mot « race » : ce n’est pas en le supprimant qu’on le fera disparaître de la tête de ceux qui, malheureusement, y croient encore, sauf à instituer une terrible police de la pensée digne des plus grands régimes totalitaires.

Mais là en fait n’est pas le plus important. Ce qu’oublient les idéologues et les incultes, c’est que le mot race a deux significations et que d’ailleurs la première d’entre elles n’est qu’une dérivée idéologique, instrumentalisée et bornée de la seconde[i] :

  • Les nazis, et les racistes de tous poils, ont définit la race comme une subdivision de l’espèce humaine suivant des critères biologiques arbitraires et plus ou moins subjectifs. Cette définition n’a évidemment aucun fondement scientifique. Une personne dont la couleur de peau est blanche peut très bien avoir davantage de gènes en commun avec une personne dont la couleur de peau est noire qu’avec une autre personne de couleur blanche.
  • Mais ce n’est pas là le sens originel du mot. Initialement le mot « race » ne fait que désigner l’ensemble des ascendants et descendants d’une même famille. Pris dans sa définition la plus extensive, il n’y a évidemment qu’une seule et unique race humaine.

Cette double définition, lorsqu’on la met en corrélation avec l’expression « la République ne reconnaît aucune race », est donc lourde de sens :

  • D’une part, et de manière évidente, cela signifie que la République ne tolère aucune différentiation des personnes selon une classification quelconque reposant sur des critères biologiques, indiquant ainsi qu’elle ne souffre aucune idéologie raciste en son sein.
  • Mais, et c’est sans doute encore plus important, cela signifie que la République ne fait aucune distinction entre ses citoyens selon leurs origines familiales (contrairement à, par exemple, l’Ancien Régime).

Que signifierait alors la disparition du mot « race » des textes de la République ? Qu’elle n’exerce plus aucune vigilance à l’égard d’une résurgence potentielle des idéologies racistes ? Qu’elle tolèrera désormais que des distinctions puissent être faites en son sein selon la naissance ?

Dès lors que l’on se penche un peu sur le sens des mots, il apparaît de manière évidente que ce projet de loi est non seulement un non-sens, mais une insulte à l’intelligence, à la culture et finalement à … l’égalité en tant que fondement de la République. De manière encore plus ironique, on remarquera qu’elle est intrinsèquement vouée à l’échec. Il restera toujours un texte de la République qui utilisera le mot « race » : celui qui en proscrit l’usage …

Comme je le relevais dans l’article précédent sur la novlangue, ceci n’est malheureusement pas un cas isolé et ce schéma orwellien est en train de s’insérer insidieusement à peu près partout. On songe ainsi à supprimer les appellations « père » et « mère » (comme si elles n’étaient pas des réalités physiques incontestables). Les caméras que nous croisons dans à peu près tous les espaces publics ne font plus de la « vidéosurveillance » mais de la « vidéoprotection », voire de la « vidéotranquilité » ! Quelle sera la prochaine étape ? Au nom de la théorie des genres, on supprimera les mots « homme » et « femme » ?

[i] Je ne parle évidemment pas de l’application du mot « race » aux animaux qui ne fait partie du sujet.

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