Le Président Sarkozy et la stratégie du choc
L’objet de ce site n’est pas de faire de l’anti-sarkosysme primaire. Toutefois après 3 ans de présidence, et au-delà des mensonges du programme initial, force est de constater que le programme de notre gouvernement suit une véritable logique en ligne de fond, que l’on peut scinder en deux phases :
Pendant les 3 premières années faire des largesses en tous sens :
- Pour les grandes fortunes : le bouclier fiscal (au sens large), la défiscalisation des héritages et autres aberrations fiscales (1).
- Pour les grandes entreprises : plan de relance, Grand emprunt (dont personne ne sait trop bien où en parti l'argent), le crédit d’impôt recherche et diverses petites mesures elles aussi passée quasi inaperçue (par exemple : la carte de téléchargement MP3 pour les moins de 25 ans cofinancé par l'Etat, fabuleux cadeau pour les majors du disque).
Ces largesses mettent l'Etat en position de quasi-faillite, ce qui donne un alibi pour des mesures de rigueur qui sont essentiellement payées par les classes moyennes (2), voire les plus pauvres :
- Suppression de postes de fonctionnaires, diminution drastiques (et souvent aberrantes (3)) des budgets de fonctionnement des administrations, allègement des dispositifs basés sur la solidarité (notamment dans le secteur de la santé).
- Augmentation masquée de la fiscalité sur les classes moyennes :
- Suppression des quelques niches fiscales dont elles bénéficient (en l'occurrence actuellement le crédit d'impôt sur l'achat de la résidence principale). A noter qu'à contrario, aucune mesure contre les niches des grandes fortunes ou du capital n’est annoncée.
- Suppression des quelques aides sociales dont elles bénéficient (par exemple les APL des étudiants (4)).
C'est exactement le scénario que décrivait Naomi Klein dans La stratégie du choc. Pour faire plier la volonté d’une personne sous la torture, il
existe deux solutions :
- Soit on lui assène un choc extrêmement violent (par exemple en lui coupant un membre ou en la privant brutalement d’un de ses sens).
- Soit on multiplie les petits chocs pour lui faire perdre tout repère (méthode d’électrochocs utilisée par la CIA dans les années 50 pour réaliser des lavages de cerveau)
Il en va de même pour soumettre la volonté d’une population d’un pays :
- Soit on l'assomme à l'aide d'un grand choc (guerre, coup d'Etat, catastrophes naturelles, crise économique).
- Soit on réalise de multiples petits chocs pour lui faire perdre ses repères (méthode que l’on peut mettre en parallèle avec la stratégie de l’étouffement dénoncée par Pierre Cahuc, André Zylberberg, Les réformes ratées du Président Sarkozy)
Le Président Sarkozy a bénéficié du premier (crise économique) mais il a aussi très bien su mettre en place la deuxième méthode par une stratégie de communication hyperactive : sur le front de
l'Elysée, il se passe tous les jours quelque chose, tant et si bien qu'à la fin on ne sait plus distinguer l'essentiel de l'accessoire.
Certains déplorent le manque de vision à long terme de notre Président. C’est faux. Il en existe une et elle est même parfaitement précise et calculée : la réduction de l’Etat à sa plus simple expression pour laisser tout le champ libre à l’entreprise privée. A son extrême limite, l’Etat ne sera plus constitué que d’un simple ministères des finances chargé de distribuer les subsides publics par le biais de multiples contrat d’externalisation.
Nous reviendrons plus tard sur l’incompatibilité totale de ce dogme avec toute forme de démocratie et avec toutes les valeurs qui ont fait la France.
(1):
- Frédéric Lemaître, Un bouclier sarkozyste en diable, Le Monde, 11 avril 2010.