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L'Oeil de Brutus

LA FONCTIONNAIROPHOBIE (partie 3 sur 4) : La fonction publique et la société française

23 Novembre 2012 , Rédigé par L'oeil de Brutus Publié dans #Idées

fonctionnaira6c7-e3a08LA FONCTIONNAIROPHOBIE

 

 

Cette série de billets s’appuie sur un article (ou plutôt sur la contradiction d’un article) écrit par M. Eric Verhaeghe et paru sur Atlantico.fr (Ce que le projet de loi de finances révèles sur le poids réel de la fonction publique sur le budget de la France) pour tordre le cou à un certain nombre de préjugés sur la fonction publique.

 

 

 

 

 

 

Sommaire :

1/ Sur les effectifs de la fonction publique.

2/ Les revenus et la parité au sein de la fonction publique.

3/ La fonction publique et la société française.

4/ L’idéologie néolibérale et son bouc émissaire 

 

 

 

3/ La fonction publique et la société française. 

 

 

 

La conclusion de M. Verhaeghe ne manque pas de piments : « la fonction publique a fait du gras, dans tous les sens du terme : en effectifs globaux, et en rémunération, surtout pour ses cadres dirigeants. ». Reprenons :

 

-          L’augmentation des effectifs globaux : c’est vrai pour les collectivités, entièrement faux pour la fonction publique d’Etat qui a diminué ses effectifs, tandis que la fonction publique hospitalière a peu ou prou progressé au rythme de l’évolution de la population.

 

-          L’augmentation des rémunérations : son article ne fait référence qu’à l’augmentation des primes des fonctionnaires (certes importante en 2009 et 2010) mais ne donne aucune indication précise sur une évolution globale des rémunérations. Il admet même que les bas salaires des fonctionnaires ont stagné ! Certes, il relève que les hauts salaires ont dans le même temps augmenté plus fortement que l’inflation. Mais on pourrait aussi se demander si ce n’est pas la structure salariale de la fonction publique qui n’a pas évolué en confiant de plus en plus les tâches d’exécution à des prestataires extérieurs, ce qui, arithmétiquement, diminue la part des bas salaires et entraîne une croissance de la part des hauts salaires. En outre, nous avons vu ce qu’il en était de sa comparaison avec le secteur privé.

 

Puis, M. Verhaeghe affirme que ce poids (supposé) de la fonction publique entraîne « une aversion grandissante pour le risque dans la société française, un manque de mobilité, de souplesse dans l’emploi, et une complexité grandissante des législations et des réglementations ». Cela relève la aussi d’une profonde méconnaissance de la fonction publique. Le lien de causalité entre contrat à durée indéterminé et aversion pour le risque est déjà douteux en lui-même, alors de là à affirmer que le fait que la France ait un nombre important de fonctionnaires entraine que l’ensemble de la société a une aversion avérée du risque … On pourra aussi évoquer la conception du risque qu’ont les fonctionnaires que sont les policiers, les pompiers, les militaires ou encore les services d’urgence des hôpitaux, ces quatre catégories formant une part non négligeable de la fonction publique[i]. Mais surtout, M. Verhaeghe semble ignorer qu’une part importante (et grandissante) de la fonction publique (et encore plus du secteur public, puisqu’il a tendance à confondre les deux) est constituée de contractuels. La même ignorance se retrouve sur la question de la mobilité et de la souplesse dans l’emploi : la plupart des fonctionnaires de catégorie A sont soumis à une forte mobilité (sans même parler des mutations des militaires) qui n’a probablement rien à envier à celle du secteur privé. Les autres catégories de fonctionnaires sont certes soumises à une faible mobilité, mais hormis la multitude de travailleurs précaires, il en est globalement de même dans le secteur privé. A moins qu’en bon libéral, M. Verhaeghe ne suggère ici de généraliser la précarisation du travail tant dans le secteur privé que dans le secteur public. Quand à la « complexité grandissante des législations et des réglementations », nous sommes bien d’accord. Sauf que dans un Etat de droit, les fonctionnaires n’ont aucun pouvoir de décision sur les lois et les règlements. Ce sont les élus qui décident des lois et règlements.

 

Enfin, il conclut son article en évaluant le coût de l’augmentation des moyens de la fonction publique à 80 milliards d’euros annuels. On aurait juste aimé connaître d’où vient ce chiffre, comment il a été calculé et quel est son périmètre de référence.

 

    Sommaire :

1/ Sur les effectifs de la fonction publique.

2/ Les revenus et la parité au sein de la fonction publique.

3/ La fonction publique et la société française.

4/ L’idéologie néolibérale et son bouc émissaire


[i] Et qu’en est-il du « risque » pour l’enseignant qui quotidiennement est confronté à une classe « turbulente » d’un quartier difficile ?

 

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