NEOLIBERALISME ET FEODALISME
Imaginons un instant que nous soyons allé jusqu’à l’extrême logique libérale : tout est privatisé. Par exemple, la sécurité. C’est-à-dire que dans ce domaine (comme dans tous les autres), vous devez souscrire un contrat d’assurance auprès d’une entreprise privée qui en retour se charge d’assurer votre sécurité. Bien évidemment, l’enfant de pauvres n’a pas ce luxe. Il peut donc allégrement se faire tabasser et racketter à la sortie de l’école. Mais non, suis-je bête ! Il ne va pas à l’école puisque celle-ci étant également privatisée, ses parents n’ont pareillement pas les moyens de la lui payer. Ils n’ont d’ailleurs également pas les moyens de le nourrir : au chômage dans le monde ultralibéral, on ne touche pas d’aides sociales.
Il ne leur reste alors que deux solutions : soit vivre de brigandages (mais étant donné que les possédants sont bien « assurés », ils ne pourront que brigander les plus pauvres qu’eux …), soit offrir le seul bien qu’ils aient, leur main d’œuvre, à un puissant qui en retour leur assurera le minimum de sécurité, d’alimentation et éventuellement de formation – et non pas d’instruction et encore moins d’éducation[1] - selon ses besoins en main d’œuvre qualifiée. Bien évidemment, ce minimum pourra fortement varier selon la situation économique du dit puissant. Celui-là même devra d’ailleurs s’inscrire dans un schéma similaire de vassalité auprès de plus puissant que lui. Mais rassurez-vous, dans ce monde là nous sommes libres … de changer de « puissant » comme nous le désirons … enfin, selon le contrat qui nous lie à lui[2]. Et quand on a le ventre creux, on n’est généralement pas en très bonne posture pour bien négocier un contrat.
Revenons à notre enfant, qui finit bien par grandir et à son tour avoir des enfants. Ceux-ci s’en retrouveront eux aussi analphabètes, sans instruction et sans éducation et donc fermement résolus à suivre les traces de leurs parents et grands-parents.
Mais, messieurs les néolibéraux, ultralibéraux, libertariens, thuriféraires du tout-marché (qualifiez-vous comme vous le souhaitez), ce monde a déjà existé : c’est la féodalité moyenâgeuse.