LE SWIFTGATE (Circus Politicus 12/14)
CIRCUS POLITICUS
Le « Swiftgate ».
La Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication (SWIFT) est une société belge qui a la forme d’une coopérative bancaire chargée de la transmissions de données (dont les ordres de virement) entre les banques.
En 2001, suite aux attentats du 11 septembre, les Etats-Unis la somme de lui fournir, sans aucun contrôle, toutes les données qu’ils pourront estimer nécessaire à la « lutte contre le terrorisme ». SWIFT obtempère et l’affaire est tenue secrète sauf des banques centrales, notamment de la BCE, jusqu’à ce qu’elle soit révélée par le New York Times en 2006. Le Parlement européen s’en émeut : les données personnelles de tous les citoyens de l’Union peuvent ainsi être consultées sans aucun contrôle judiciaire par les autorités américaines (pages 219-220). Contrainte par le scandale, la Commission européenne décide de nommer une « personnalité européenne éminente » pour vérifier que les Etats-Unis font bon usage de ce droit exorbitant. Cette personnalité c’est Jean-Louis Brugière, l’ancien juge antiterroriste, dont on apprend par Wikileaks, qu’il a été un visiteur régulier de … l’ambassade des Etats-Unis (page 221) ! En 2008, il finit par rendre un premier rapport qui devait faire état de la transparence des actions américaines sur SWIFT, mais ce rapport est … classifié « secret défense » (page 222) ! Pour encadrer légalement les échanges entre SWIFT et les Etats-Unis, les ministres de l’intérieur de l’UE finissent par signer un accord, dans le huis-clos des Conseils de l’Union, le 30 novembre 2009 avec prise d’effet … dès le lendemain ! Le Parlement européen (et ne parlons même pas des parlements nationaux …) a été court-circuité. Les députés européens finissent par se rebiffer en février 2010 en rejetant massivement cet accord qui en pratique donne un blanc-seing au Etats-Unis (page 223). Comme le relève la députée européenne (PS) Sylvie Guillaume, les parlementaires sont alors la proie d’un intense lobbying, non dénué de fortes pressions : « Nous avons subi de grosses pression, du chantage sur le thème : « Vous prenez la responsabilité de mettre en échec la lutte contre le terrorisme ». Ces pressions ont transité par la Commission européenne ». Le Parlement européen finit tout de même par obtenir gain de cause en validant en juin 2010 un accord qui impose aux Etats-Unis de faire transiter leurs demandes (qui ne pourront plus être « en vrac ») via Europol ainsi qu’une obligation de réciprocité avec les données détenues par les organises américains (page 224). Mais, en mars 2011, l’ACC (Autorité de Contrôle commune) jette un nouveau pavé dans la mare : les demandes américaines demeurent trop générales et abstraites ; malgré tout, Europol les a toutes acceptées (pages 224-225) !