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L'Oeil de Brutus

CES « PARASITES » QUI VIVENT AUX CROCHETS DE L’ETAT

22 Mars 2013 , Rédigé par L'oeil de Brutus Publié dans #Idées

 

index-copie-11.jpgCES « PARASITES » QUI VIVENT AUX CROCHETS DE L’ETAT

 

 

 

 

 

C’est un argument de rhétorique utilisé extrêmement régulièrement par les libéraux : si la France va mal (et en particulier ses finances publiques), c’est que l’assistanat y est trop développé. Autrement dit, il y a trop de « parasites » qui pompent les finances publiques et le niveau de rémunération de cet assistanat n’encourage pas au travail. Cet argumentaire sert de justification non à la réforme mais au démantèlement en cours depuis une dizaine d’années (et très largement prolongé par la « gauche de droite » actuellement au pouvoiri) de tout notre système de protection sociale : il faut retirer la perfusion sociale à tous ces fainéants et autres chômeurs, ça leur filera un coup de pied au cul pour aller travaillerii. D’une pierre, on fera deux coups : assainissement des finances publiques et forte baisse du taux de chômage.

Admettons un instant. Admettons qu’il y ait en France 1 million (le chiffre est déjà énorme en lui-même) de ces « parasites » qui ne veulent en aucun cas travailler. Admettons qu’ils perçoivent en prestations diverses et variées en moyenne 1 000 euros par mois (là aussi on se situe très certainement dans le haut de la fourchette d’évaluation). Ils nous « coûtent » donc 1 milliards d’euros pas mois. 12 milliards par an. Le chiffre vous paraît énorme. Mais mettons le maintenant en parallèle avec d’autres chiffres :

  • Entre 30 et 40 Mds€iii : l’estimation du montant annuel de la fraude fiscale. Autrement dit, si on se met dans la même logique, stérile et attisant les divisions (mais c’est bien là le but de la manœuvre), de lutte des classes que les libéraux qui vilipendent ces « salauds de pauvres », la fraude des « riches » qui refusent de se soumettre à l’impôt coûte trois fois plus chère que les « parasites ».

  • Environ 40 Mds€ : les frais de fonctionnement (et uniquement de fonctionnement !) cumulés des départements.

  • Entre 7 et 12 Mds€ par an : la fraude à la TVAiv.

  • 100 Mds€ par an : le manque à gagner généré par les multiples allègements fiscaux, pour la plupart des niches fiscales, offerts par la droite au pouvoir depuis 2002 et que la gauche libérale ne semble nullement remettre en cause (elle préfère diminuer les retraites et les allocations familiales ou augmenter la TVA …).

  • Entre 8 et 20 Mds€ / an = le montant des fraudes sociales des employeurs (selon le député UMP Dominique Tian).

  • Et surtout plus de 50 Mds€ : Les intérêts annuels payés sur la dette publique contractée, au nom de la logique de marché, auprès de rentiers internationaux (Lire Faut-il monétiser la dette ?).

 

On le voit donc bien la rhétorique libérale sur ce sujet se démonte en deux coups de cuillères à potv. On peut certes condamner l’assistanat (et je suis bien d’accord sur ce point !), mais ce n’est pas là la source de tous nos maux. Absolument pas. Alors pourquoi ? De prime abord, pour justifier la casse sociale de notre système hérité du Conseil Nationale de la Résistance. Mais ceci est presque secondaire. La raison profonde est ailleurs : il faut dévier le débat pour ne pas qu’il s’oriente vers de vraies solutions. La raison profonde, c’est la peur. La peur que les classes moyennes se rallient aux classes populaires pour bouter une élite qui s’est muée en classe dominantevi, une oligarchie qui s’est accaparée tous les pouvoirs, économiques, politiques et médiatiques. La peur que les classes moyennesviise rendent comptent que l’ascenseur social, s’il n’est pas encore complètement en panne, a ses limites : qu’un fils ou une fille de proloviiidevienne ingénieur, d’accord ; mais qu’il ou elle en arrive à prendre les commandes d’une grande boîte, d’un ministère ou d’une page de journal (même transformé en torchon de propagande publicitaire sauce Dassault, Bolloré ou Lagardère), faut quand même pas déconner. Bien sûr, on va en laisser quelques uns en affichage, pour faire rêver les enfants et qu’ils se tiennent bien sages, mais non sans les avoir préalablement rallié à la cause oligarque, tel cet ancien apôtre de la décroissance aisément acheté avec un strapontin ministériel sans pouvoir. Et puis un espèce de Cyrano dépanaché en goguette qui insulte les grands patrons, ça fait sympa pour le prolo, surtout si le patron en question est étranger (indien ou américain de préférence). Tant que ça reste de l’insulte et qu’il ne passe aux actes (et ça ne risque pas !). Restez calmes les enfants : Casimir passe à la télé tous les soirs, au JT de 20 heures, et il est parti en croisade pour sauver vos emplois.

L’oligarchie a peur. Peur de la réunion des classes moyennes, traditionnellement plutôt conservatrices, et du prolo-populaireix. Pour éviter cette réunion, elle flatte les uns avec du libéral, les autres avec du libertairex. Elle donne à bouffer aux premières du supposé fainéant issus des seconds, et si ça ne suffit pas, les seconds n’ont qu’à se rassasier avec de l’immigré, ça coûte encore moins cherxi. Au passage, on peut aussi rajouter un p’tit débat sur la laïcité, la place de l’Islam, l’identité nationale, la prostitution, les salles de shoot ou le mariage gay : ça amusera la galerie, donnera l’illusion d’une différence entre les deux partis qui se partagent le pouvoir et les gueux penseront à autre chose qu’à renverser la table d’une République qui n’est plus leur « chose publique » mais la chose des puissants. L’oligarchie a bien raison d’avoir peur. Le véritable parasite qui vit aux crochets de la société, c'est elle. Et il faudra bien qu’un jour, cela cesse.

 

 

i J’avais déjà écris un article sur ce sujet alors que l’équipe précédente (différente dans son étiquette et dans la clientèle qu’elle sert, mais absolument pas dans son idéologie). Cf. Les chômeurs, ces profiteurs …

 

ii Mais, s’ils ne trouvent pas d’emplois, ils n’auraient alors plus aucun moyen de subsistances pour vivre. La nature humaine étant ce qu’elle est – elle conçoit difficilement de se laisser mourir – je vous laisse imaginer les moyens qu’ils mettraient en œuvre pour trouver ces subsistances … Les très très aisés dans leurs quartiers privés de Neuilly ou du 16e arrondissement de Paris, avec leurs vigiles privés n’auraient pas grand-chose à craindre. Pour les employés et les classes moyennes, confrontés à une police et à une Justice à laquelle on a progressivement coupés les moyens, ce serait autre chose. A défaut d’êtres servis par la redistribution, les « parasites » iraient se servir directement sur la bête. Et celle-ci est toujours la même : la « tranche couillon ».

 

iii : Lire Christian Salmon, l’ADN du Sarkozysme, Médiapart, 3 décembre 2011. Et depuis 10 ans, la lutte contre la fraude fiscale n’a guère donné de résultats, cf. Yohann Duval, La lutte contre la fraude fiscale : une priorité nationale, blog Yohann Duval, 17 novembre 2012.

 

iv Lire Thibault Gajdos, Fraude sociale et fraude politique, Le Monde économie, 21 novembre 2011.

 

v On remarquera que nos grands médias, ces jolis toutous chiens de garde de la contre-révolution néolibérale-libertaire, s’en abstiennent bien (ou alors le fond bien discrètement pour ne pas échauffer les oreilles de leurs gentils patrons-actionnaires), y compris – et surtout – ceux qui se prétendent « de gauche » à la sauce Christophe Barbier, Laurent Joffrin et autres semi-pamphlétaires tendance Libération.

 

vii La notion de classes moyennes est prise ici dans le sens le plus extensif : un patron de TPE, voire de PME, est tout aussi concerné.

 

viii Le prolo aussi est pris dans son sens le plus extensif. Cf. Jean-François Copé : « à moins de 5000 euros, on aura que des minables », à un de ses collègues UMP de l'Assemblée, pour justifier sa position sur le cumul des mandats politiques, cité par Sophie Coignard et Romain Gubert, L’oligarchie des incapables.

 

ix Lire Henri Hude, 38 maximes sur le conservatisme et les conservateurs, blog Henri Hude, 28 janvier 2013.

 

x Lire Henri Hude, Jusqu'à quand subirons-nous les libéraux-libertaires (L.L.) ?, blog Henri Hude, 7 mars 2013 ; Pour une recomposition politique, blog Henri Hude, 2 février 2013.

 

xi C’est ainsi que le FN est indispensable au maintien en place de la dyarchie PS-UMP. C’est ce qui lui permet de faire du chantage aux bonnes consciences : « certes on vous écœure, ça fait 4 décennies qu’on a fait la preuve de notre incompétence, mais votez pour nous, votez utile, car c’est nous ou les fachos ». Le FN est élément essentiel du maintien en place de « l’UMPS » car il empêche l’émergence de toute force républicaine (et non pseudo-républicaine par opportunisme tel que l’est le parti de Mme Le Pen) à même de bouleverser la donne du jeu politique.

 

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B
Il faut retirer la perfusion sociale à tous ces fainéants et autres chômeurs ! <br /> Et qui délocalise, pour une main d'oeuvre gratos ? sans compter ces entreprises qui battent de l'aile !<br /> Il n'y a plus de jobs, car c'est grâce à nos dirigeants hypocrites, laxistes qui ont détruit notre pays, nos emplois, avec cette immigration massive. Par contre pour les politicards, eux se fabriquent des emplois fictifs, MDR, ect..... ha ha ha ils me feront toujours rire les donneurs de leçons, prenez vous-en aux personnes responsables !!!
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P
J'apprécie votre blog , je me permet donc de poser un lien vers le mien .. n'hésitez pas à le visiter. <br /> Cordialement
Répondre
L
Bonsoir, <br /> <br /> Je n'ai pas trouvé votre lien ? <br /> <br /> Cordialement.
É
Et pendant ce temps la les travailleur independants payent de plus en plus de charges sociales ....super vive la france !
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P
cette si belle phrase n est pas de mot mais de Mr Churchill,un brillant economiste a mes yeux allez rien que pour le plaisir j en remet deux autres.<br /> <br /> « Le vice inhérent au capitalisme consiste en une répartition inégale des richesses. La vertu inhérente au socialisme consiste en une égale répartition de la misère. »<br /> de Winston Churchill <br /> <br /> « On considère le chef d'entreprise comme un homme à abattre, ou une vache à traire. Peu voient en lui le cheval qui tire le char. »<br /> de Winston Churchill
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A
Quelle belle mythologie !<br /> <br /> Les patrons sont tous vertueux, seulement vertueux et toujours vertueux !<br /> <br /> Et c'est admirable, cette boutade qui donne raison au capitalisme même quand il a tort ! pour mieux dénigrer la régulation ou pire : les alternatives !<br /> <br /> On voit ce qu'est un brillant économiste ; le partisan du cul de pied au cul pour les travailleurs, et louange aux patrons et rentiers. Et surtout pas d'impôt.
I
Question fraude fiscale le ps est une source intarissable d inspiration le Cahuzac a menti devant la représentation nationale et le valls (stapo) aurait des compte en suisse ...alors que les français sont pressé comme des citron ... <br /> Réducteur oui c est le mot exact puisque le socialisme ne créer que des déserts économiques ... <br /> <br /> Christophe Colomb fut le premier socialiste : il ne savait pas où il allait, il ignorait où il se trouvait… et il faisait tout ça aux frais des contribuables.&quot;<br /> Winston Churchil
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L
Le PS n'est pas vraiment le sujet. Ceci dit j'aime beaucoup votre bon mot avec Christophe Colomb. Mais celui-ci a quand même un avantage indéniable sur le PS : au moins, il a fini par trouver quelque chose. Avec le PS on attend toujours ...