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L'Oeil de Brutus

Les nouveaux inquisiteurs : le terrorisme intellectuel comme moyen de tarir le débat et de tuer la démocratie

30 Mars 2015 , Rédigé par L'oeil de Brutus Publié dans #Idées

Les nouveaux inquisiteurs : le terrorisme intellectuel comme moyen de tarir le débat et de tuer la démocratie

 

 

L’affaire est vieille comme la politique : quand son argumentaire défaille, l’hypocrite autoritariste limite sa pâle ambition à rejeter son opposant dans les limbes d’une présomption en irrecevabilité démocratique. Le politiquement correct n’est qu’un terrorisme intellectuel qui avance masqué. Et terrorisme est bien le mot puisqu’il s’agit pour son employeur de jouer sur la crainte de son opposant de se trouver non seulement exclu du débat mais mis à l’index (au sens premier de l’expression) de toute la société. Hyper-médiatisée, celle-ci tend en effet à faire de son anathème une véritable mort intellectuelle, voire sociale. Si les terroristes « physiques » - islamistes, djihadistes, extrémistes ou tous autres – parviennent à nous frapper dans nos chairs, ils n’en sont pas en mesure, tout indéniable respect dû aux victimes mis à part, de mettre à bas l’ordre démocratique[i]. A contrario, les terroristes intellectuels en s’attaquant à toute chaire intellectuelle qui leur disconvient, sont, eux, en mesure et en passe de saper fondamentalement tout notre modèle démocratique. Le Calliclès du Gorgias de Platon a ainsi de bien nombreuses émules contemporaines, comme si l’exubérance outrecuidante du sophisme était la marque des fins de cycles démocratiques.

Jean-Paul Sartre fut le mentor intellectuel de bien de nos pseudo-révoltés contemporains, avant que ceux-ci ne virent casaques, sans jamais vraiment se dédire : du trotskisme au néolibéralisme, il n’y eu souvent qu’un pas de fourmi, l’intégrisme idéologique suivant de l’un à l’autre en proportion égale. Sartre donc, qui trouva l’Occupation bien doucereuse (« mieux valait une France nazifiée, qu'une France en guerre » se justifiait-il), fut aussi un maître de l’anathème de salon, celle qu’on lance sûr de ne rien risquer, avec 120 compagnons[ii] tout aussi convaincus de leur suffisance, pour encourager les autres, et en particulier le petit peuple qu’ils prétendent défendre mais en vérité méprisent profondément de toute la hauteur de leur fatuité, à tous les risques physiques (tant qu’eux n’en prennent pas, tout va bien) ou tous autres porteurs de valises. « Tout anticommuniste est un chien », clamait-il dans ce qui fut sans doute l’annonce même de la forme implacable du terrorisme intellectuel de notre époque, de ce rejet dans les limbes de l’exo-humanité de tout opposant potentiel au maître sartrien. Et quoi de mieux que de pousser la chansonnette jusqu’à l’appel au crime pour « abattre un européen », car « c'est faire d'une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé : restent un homme mort, et un homme libre ».

On attend toujours de voir Sartre un pistolet à la main … Il n’empêche qu’il a depuis fait des petits. Ainsi d’Alain Badiou[iii] qui, depuis la mort du maître, ressasse, presque dans le vide (fort heureusement), les mêmes excommunications, les « chiens » s’étant mués en « rats »[iv].

 

 

A suivre, plusieurs chapitres sur le terrorisme intellectuel :

Economie : la pomme de Gombeaud

L’Europe : Funkpropaganda et blablabla

Fascisme à outrance

Pravda, quand tu nous tiens

Les questions sociétales à la lorgnette libérale-libertaire

 

 

[i] En tout état de cause, ils font bien moins de victimes que la criminalité « conventionnelle » (environ 1000 meurtres par an en France, soit une moyenne de trois par jour), la circulation routière ou, à l’échelle de la planète, le paludisme (1 million de morts par an), maladie qui peut pourtant aisément être prévenue sinon soignée.

[ii] Cf. Le Manifeste des 121.

[iii] Sur Alain Badiou, lire "Un Alain Badiou n'est possible qu'en France" , Lucien Bianco , Marianne, 13-déc-14

[iv] Lire Bruno Chaouat, Chiens, rats, anticommunistes, Libération, 10 janvier 2008.

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I
Le chien est un être fidèle, doué de raison et sensibilité. Donc.
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